HASSAN II

HASSAN II
HASSAN II

HASSAN II (1929- ) roi du Maroc (1961- )

Né à Rabat sous le Protectorat français, le prince Moulay Hassan reçoit au Palais une éducation à la fois orientale et européenne, puis obtient une licence et un diplôme des hautes études de droit à la faculté de Bordeaux. Associé dès son plus jeune âge à la gestion des affaires publiques, il épouse très tôt la cause du nationalisme. Il décide de suivre son père en exil et, à son retour, partage l’énorme prestige populaire conquis dans cette épreuve. À l’indépendance, il est placé, dès leur création, à la tête des Forces Armées Royales où il réussit à intégrer les forces de l’armée de libération. Nommé en 1957 héritier de la couronne royale, il assume dans le sillage de Mohamed V certaines prérogatives du pouvoir et, en mai 1960, après le succès de la gauche aux élections locales, il persuade son père de prendre lui-même la présidence du Conseil du gouvernement et de lui en confier la vice-présidence, pour couper court à l’expérience progressiste du cabinet Ibrahim. Il donne alors la mesure de son autorité naturelle, de son réalisme et de son intelligence politiques jusqu’à la mort subite de Mohamed V en février 1961. Solennellement intronisé avec l’accord des Oulémas, des docteurs de la loi et des autorités du royaume, il inscrit son action politique dans la trace des principes et des orientations définies par son père. Fidèle à ses promesses, il fait élaborer une Constitution inspirée du modèle français de 1958 et de l’héritage du califat, qui codifie la suprématie politique et institutionnelle de la monarchie à l’intérieur d’un cadre parlementaire purement formel et d’un multipartisme étroitement contrôlé. Après les violentes émeutes populaires de Casablanca (1965), il met fin à l’expérience constitutionnelle et instaure l’état d’exception en recourant à l’article 35. Le régime se radicalise, la répression contre l’opposition s’accentue, et le pouvoir se concentre exclusivement autour du roi, partagé entre le cercle restreint du Palais Royal et le réseau d’élites administratives tissé par le ministre de l’Intérieur. La nouvelle Constitution de 1970, loin de recréer une ouverture, pérennise le système jusqu’aux attentats manqués de l’armée en 1971 et 1972 qui lui font prendre la mesure de la crise et le décident à sortir de l’immobilisme.

La relance du dialogue avec l’opposition, après la révision constitutionnelle de 1972, échoue, mais elle crée les conditions d’une unité nationale que le danger extérieur va précipiter.

La décolonisation du Sahara espagnol donne au roi l’occasion de reprendre l’initiative et de mobiliser autour de lui, grâce au succès de la Marche verte, l’ensemble des forces politiques.

Le consensus sur le Sahara et la reprise en main du secteur économique permettent à Hassan II de poursuivre durant deux décennies un jeu subtil de démocratisation formelle, limitée aux élites et savamment contrôlée, qu’il maîtrise avec talent et avec la complicité de l’ensemble des acteurs du système politique marocain. Aux élections locales de 1976 et législatives de 1977, il parvient à conforter son pouvoir sur des bases plus consensuelles en associant au gouvernement de Ahmed Osman, son beau-frère, l’Istiqlal et le Mouvement populaire.

Entre 1979 et 1981, sous l’effet conjugué du poids financier de la guerre du Sahara et des soulèvements urbains qui poussent le régime à amplifier la répression, il tente en vain de renouer le dialogue avec l’opposition partisane et syndicale. L’économie marocaine accusant de graves déficits commerciaux et financiers, le roi est obligé de négocier avec le F.M.I. et la B.I.R.D. des accords de prêts et de rééchelonnement de la dette, au prix de mesures d’assainissement et de restructuration. Il confie cette politique d’ajustement à un nouveau gouvernement dominé par les technocrates. Pour s’assurer la maîtrise du champ social, Hassan II réactive les ressources symboliques et politiques du Makhzen (mode de gouvernement traditionnel des sultans), tout en s’appuyant sur des réseaux d’influence implantés par son puissant et dévoué ministre de l’Intérieur Driss Basri, dans le monde rural et urbain.

Face à l’emprise souterraine mais réelle d’un islamisme diffus, il réinvestit, en tant que commandeur des Croyants, le champ religieux et réorganise un islam à sa dévotion. À partir de 1986, le roi se décide à libéraliser le régime pour répondre aux exigences pressantes et convergentes de la classe politique et de la société civile. La pression intérieure et internationale l’oblige à opérer des concessions sur le terrain des droits et des libertés: il crée un Conseil consultatif des droits de l’homme, qui va à la fois cautionner et filtrer sa politique d’amnistie et d’élargissement des détenus, y compris politiques. L’effervescence démocratique ravivée à l’occasion de la crise du Golfe et l’ampleur du déficit social attestée par des émeutes tragiques en 1990 l’amènent à de nouvelles avancées sur le terrain institutionnel et social: une Constitution adoptée en 1992 rééquilibre les pouvoirs et adapte leur fonctionnement aux normes de l’État de droit. L’opposition réunie au sein d’un Bloc démocratique renforce son poids politique aux élections de 1993 au point de priver le roi d’une majorité parlementaire réelle. Invitée à former un “gouvernement d’union nationale”, elle refuse de céder aux conditions jugées trop contraignantes. En mai 1994, la nomination d’un nouveau cabinet dirigé par Abdellatif Filali, ex-ministre des Affaires étrangères et beau-frère de la princesse Lella Meriem, accrédite à nouveau l’hypothèse d’une alternance sous contrôle royal. Au terme de longs pourparlers et en dépit d’un long débat interne très ouvert et controversé, le roi refuse de céder à l’intransigeance de l’opposition, écartant notamment toute idée de révision de “sa” Constitution. Après avoir dissous le gouvernement en février 1995, il reconduit Abdellatif Filali, qui constitue un cabinet issu de trois partis majoritaires et formé de “technocrates” affectés à des postes stratégiques.

En plus de trente ans de règne, Hassan II a su gérer les tensions d’une société composite et conforter ou renouveler les assises sociales permettant au régime de digérer dans la stabilité les profondes mutations économiques, culturelles et sociales d’un “empire”. Doté d’un habile savoir-faire politique, jouant sur les multiples ressorts de son statut et sur l’enracinement populaire du Makhzen, il a su intégrer l’ensemble des acteurs politiques au système monarchique, au point de rester le meilleur rempart de l’unité nationale et le garant d’un certain pluralisme. L’incertitude essentielle quant à la continuité du système réside plutôt dans les problèmes liés aux modalités et au calendrier de sa propre succession.

Hassan II Hasan II
(Hasan) (né en1929) arrière-petit-fils du préc.; roi du Maroc depuis 1961. Il succéda à son père Mohammed V, qui avait obtenu l'indépendance du Maroc en 1956. Cultivé, habile politique, il entreprit la modernisation de son pays et entretint de bons rapports avec l'Occident. Aux prises avec une opposition parfois vive, il fut souvent tenté d'adopter des mesures répressives. En 1976, il annexa la partie N. du Sahara occidental (qu'il considère comme marocain) et en 1979 la partie S. Il contribua à établir des relations entre l'O.L.P. et Israël.

Encyclopédie Universelle. 2012.

Игры ⚽ Поможем сделать НИР

Regardez d'autres dictionnaires:

  • Hassan — (auch: Hasan, arabisch ‏حسن‎, DMG Ḥasan ‚gut, der Gute‘): [ħasan] ist ein gebräuchlicher arabischer Name, bekannt durch Hasan ibn Ali, den Enkel des Propheten Mohammed. Hassan wird auch als Nachname verwendet, nicht nur im Arabischen,… …   Deutsch Wikipedia

  • Hassan II. — Hassan II. 1978 Hassan II. bei seinem Besuch in den Vereinigten Staaten 1983 Hassan II. (arabisch ‏ …   Deutsch Wikipedia

  • Hassan — may refer to:People with the given name Hassan: *Hassan (given name) *Hassan (surname)Named after the Hindu Goddess Haasanamba *Hassan, India, a city *Hassan District, IndiaPlays: * Hassan ( Hassan: The Story of Hassan of Baghdad and How he Came… …   Wikipedia

  • Hassan — ಹಾಸನ …   Wikipedia Español

  • HASSAN — HASSAN, Spanish Moroccan family whose most famous member in Spain was JAHUDA ABEN HAÇEN, the ambassador of Aragon to Granada in 1287. A refugee in Morocco, SHEMAYYAH HASSAN countersigned takkanot ( regulations ) in Fez (c. 1575). During the 17th… …   Encyclopedia of Judaism

  • Hassan — (Hasan, arab., der Schöne, Gute), Name vieler berühmter Orientalen. I. Regenten: A) Sultan von Ägypten: 1) H. el. Nasser Seifeddin, regierte 1347–1351, s. Ägypten (Gesch.) VII. A). B) Schiitische Imame u. Khalifen. 2) H., der zweite Imam, Sohn… …   Pierer's Universal-Lexikon

  • Hassan — (Hasan, »schön«), häufiger arabischer Name. Der bekannteste H. ist ein Enkel des Propheten, der ältere Sohn des Ali von Mohammeds Tochter Fâtima. Er war ein gleichzeitig frömmelnder und den Weibern ergebener Mann, der nach seines Vaters Tode 661… …   Meyers Großes Konversations-Lexikon

  • Hassan II — Pour les articles homonymes, voir Hassan II (homonymie). Hassan II الحسن الثاني Hassan II, avec George Shultz …   Wikipédia en Français

  • Hassan — Cette page d’homonymie répertorie les différents sujets et articles partageant un même nom. Sommaire 1 Sens et origine du nom 2 Variantes …   Wikipédia en Français

  • Hassan II — born 1929, king of Morocco since 1961. * * * orig. Mawlāy Ḥasan Muḥammad ibn Yūsuf born July 9, 1929, Rabat, Mor. died July 23, 1999, Rabat King of Morocco (1961–99). On his succession to the throne, he introduced a new constitution providing for …   Universalium

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”